Liste FH 004 - Santa Claus
Le père Noël tel que nous
le connaissons aujourd'hui est issu d'un triple mouvement en profondeur, l'américanisation, l'uniformisation
et la déchristianisation. Il est popularisé dans la deuxième moitié du XIXe siècle
aux États-Unis, nation d'immigrants, en majorité de protestants qui rapportent avec eux les traditions
européennes et les légendes des pays froids, leurs rennes, leurs lutins et leurs sapins. Il prend
le nom de Santa Claus, directement inspiré du saint Nicolas des Flandres néerlandaises.
En 1821, le livre A New-year's present, to the little ones from five to twelve (Un Cadeau pour le nouvel an aux
petits de cinq à douze ans) est publié à New York (sous l'influence des Hollandais qui, en
fondant la Nouvelle-Amsterdam au XVIIe siècle, importent le Sinter Klaas). Il contient le poème anonyme
Old Santeclaus qui décrit un vieil homme qui apporte des cadeaux aux enfants sur un traîneau tiré
par des rennes.
Le 23 décembre 1823, le journal Sentinel de Troy, dans l'État de New York, publie anonymement (mais
attribué au professeur américain Clement Clarke Moore ou au major Henry Livingston Junior) le poème
A Visit from St. Nicholas dans lequel saint Nicolas est présenté comme un lutin sympathique, dodu
et souriant, qui distribue des cadeaux dans les maisons et se déplace sur un traîneau volant tiré
par huit rennes nommés respectivement : Fougueux (Dasher), Danseur (Dancer), Fringant (Prancer), Rusé
(Vixen), Comète (Comet), Cupidon (Cupid), Tonnerre (Donder) et Éclair (Blitzen). Ce poème
a joué un rôle très important dans l'élaboration du mythe actuel, reprenant les attributs
de saint Nicolas (barbe blanche, vêtements rouges et hotte) mais troquant sa mitre, sa crosse et son âne
pour un bonnet rouge, un sucre d'orge et un traîneau tout en se débarrassant du père Fouettard.
Après le journal Sentinel en 1823, il est repris les années suivantes par plusieurs journaux britanniques
et américains (notamment sous l'influence des illustrateurs John Tenniel pour l'hebdomadaire Punch en 1850
et Thomas Nast dans le Harper's Weekly en 1863 qui fixent la figure du père Noël que nous connaissons
aujourd'hui, un joyeux vieillard dodu à barbe blanche, pantalon bouffant retenu par un ceinturon noir et
vareuse bordée de fourrure blanche, bonnet rouge et hotte remplie de jouets), puis traduit en plusieurs
langues et diffusé dans le monde entier.
« Zwarte Piet » et saint Nicolas notant le nom des enfants sages (gravure néerlandaise de 1850
tirée d'un album de Jan Schenkman).
Il ne semble pas que la fête de Saint-Nicolas soit réapparue à New York durant la guerre d'indépendance,
pour raviver la mémoire de l'origine hollandaise de la ville, autrefois appelée Nouvelle-Amsterdam
: cette thèse a été réfutée par Charles W. Jones qui affirme ne pas avoir retrouvé
de documentation pour l'étayer. Howard G. Hageman, qui maintient l'existence d'une fête populaire
de Saint-Nicolas chez les premiers colons hollandais de la vallée de l'Hudson en dépit de l'hostilité
de la hiérarchie protestante, affirme cependant que cette tradition hollandaise de fêter saint Nicolas
avait complètement disparu lorsque Washington Irving fonda la St. Nicholas Society of New York en 1835.
C'est vers 1850 que le passage de la célébration de la Saint-Nicolas à celle de Noël
se fixe au Royaume-Uni, en lien avec Charles Dickens et ses « Livres de Noël » qui connaissent
un gros succès (des traductions en français sont disponibles moins de dix ans plus tard). En 1863,
le journal new-yorkais Harper's Weekly représente un « Santa Claus » vêtu d'un costume
orné de fourrure blanche et d'une large ceinture de cuir. Pendant près de trente ans, Thomas Nast,
illustrateur et caricaturiste du journal, décline ensuite par des centaines de dessins tous les aspects
de la légende de Santa Claus et donne au mythe ses principales caractéristiques visuelles : un petit
bonhomme rond, vêtu d'une houppelande en fourrure, la pipe au coin de la bouche comme un Hollandais (notamment
dans un livre en couleur de 1866 intitulé Santa Klaus and his works où la couleur rouge de l'habit
est établie, mais pas encore le blanc de la fourrure parfois de couleur sombre). C'est également
Nast qui, dans un dessin de 1885, établit la résidence officielle du père Noël au pôle
Nord. Les raisons du choix d'une contrée froide et éloignée ne sont pas claires mais certainement
en rapport avec l'iconographie de Santa Claus habillé chaudement et utilisant un traîneau tiré
par des rennes. Le petit-fils de Nast a affirmé que le choix de son grand-père a été
dicté par le fait que ce pôle est équidistant de la majorité des pays de l'hémisphère
Nord. Cette idée est reprise l'année suivante par l'écrivain George P. Webster qui précise
que « sa manufacture de jouets et sa demeure, pendant les longs mois d'été, sont cachées
dans la glace et la neige du pôle Nord ».
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