Liste MH 002 - Préhistoriques
Hollywoodiens
Né au même siècle
que l'archéologie préhistorique, le cinéma s'est très tôt intéressé
aux temps antédiluviens. Dès le début du XXe siècle, des réalisateurs de renom
comme D.W. Griffith, avec Man's Genesis (1912), C. Chaplin, dans The Caveman (1914), ou B. Keaton et son Three
Ages (1923) situent leurs films dans ces temps reculés. Cependant, ce genre cinématographique ne
se développe véritablement que dans la seconde moitié du XXe siècle.
Quelques repères :
Tumak, fils de la Jungle (1940)
En 1940, alors que l'Europe est en guerre, Hal Roach signe One million BC, sorti en France sous le titre Tumak,
fils de la jungle. Une traduction peu fidèle au titre original qui fait référence à
Tarzan, que beaucoup de Français connaissent. Cette proximité avec Tarzan est renforcée par
la présence, aux côtés de Victor Mature (Tumak), de Loana, double paléolithique de Jane,
interprétée par la sublime Carole Landis.
Faisant fi de toute vraisemblance chronologique, Tumak est bien un homo sapiens, bien avant son apparition, et
les autres stars du film sont des dinosaures, disaprus depuis 64 millions d'années si l'on se fie au titre
!
Un million d'années avant JC. (1966)
Un quart de siècle après, en 1966, Don Chaffey en réalise un remake, tout aussi fantaisiste,
mais au titre traduit directement en français. Ik réussit à attirer plus d'un million de spectateurs
pour admirer le bikini, qui « a carrément tenu lieu d'argument publicitaire », et la permanente
impeccable d'une jeune starlette, Raquel Welch. Il est plus que probable que le film attira plus pour la plastique
de sa jeune vedette que pour le spectacle grotesque de dinosaures de carton-pâte. L'érotisation de
la Préhistoire, réalisée par Don Chaffey, s'inscrit ainsi dans le mouvement plus vaste de
la libération sexuelle des années 1960.
2001, L'odyssée de l'espace (1968)
Il faut attendre le génie de Stanley Kubrick pour voir enfin une représentation « réaliste
» de la préhistoire, avec la fameuse scène de l'invention de l'outil par un homme-singe au
demeurant difficile à classer taxinomiquement, mais certinement antérieur à Homo Abilis. Les
recettes aux Etats-Unis s'élèvent à vingt-cinq millions de dollars, quarante avec le reste
du monde. Abondamment commenté par la presse à sa sortie, il suscite de rares appréciations
négatives : Louis Chauvet déplorant dans Le Figaro que « nous assistons à des péripéties
auxquelles, une fois sur deux, l'assistance ne comprend strictement rien », ou Henry Chapier parlant, dans
Combat, d'une « pâtée métaphysique servie à grands renforts de cinémascope
couleur » sont bien isolés.
Mais cette scène relativement courte se termine par l'ellipse la plus célèbre de l'histoire
du cinéma où l'on voit « l'homme-singe [faisant] son apprentissage sur le squelette, le mettant
lentement en pièces. Il en détache des ossements qu'il fait voler dans les airs.[…] c'est
l'outil, c'est l'arme qui naissent de raisons subjectives et meurtrières. L'homme fait encore tourner un
os sur lui-même, verticalement, et, grâce au montage, cet os devient tout à coup, enjambant
civilisations et cultures, un outil subtil et raffiné de quatre millions d'années plus tard, un satellite
sur orbite ».
Le sixième continent (1975)
Kevin Connor tire d'une nouvelle du créateur de Tarzan, Edgar Rice Burroughs, son film The land that time
forgot (Le sixième continent). 1,9 million de spectateurs assistent aux aventures de ce sous-marin allemand
aux prises avec les dinosaures d'une île perdue au milieu des glaces. Il est suivi, en 1977, de The people
that time forgot (Le continent oublié) qui n'a pas, loin de là, la même audience : Partick
Wayne ne réussit pas le même score que Doug McClure, avec un chiffre d'entrées inférieur
à 500 000.
La guerre du feu (1981)
Le film de Jean Jacques Annaud reprend le tournant « réaliste de Kubrick. Il choisit d'adapter le
roman de Rosny Ainé. Pour Annaud, « La Guerre du Feu avait un immense mérite, celui de proposer
un thème simple et universel à un moment charnière de l'histoire de l'humanité : cette
histoire simple d'un héros à qui l'on confie le destin de sa tribu, en lui demandant de ramener le
feu que l'on ne sait pas faire, est une mission clairement identifiable, un drame humain auquel on peut se référer
et qui propose une structure dramatique tout à fait exemplaire. Un des objectifs qu'on recherche quand on
écrit un film est de permettre l'identification à une difficulté : on aime partager le drame
de quelqu'un ; or là, la responsabilité du personnage de Naoh est qu'il se voit confier cette chose
inouïe de devoir ramener impérativement le feu sinon ce groupe humain auquel il appartient risque de
disparaître. C'est un thème fort et [avec une] thématique [plus] puissante [que] dans [tout]
autre roman consacré à la Préhistoire ; en plus, le feu représente, pour certains,
une des grandes conquêtes de l'humanité et il y avait là un bel exemple que l'on pouvait rattacher
au thème du voyage initiatique, l'un des thèmes [préféré dans ses] films où
très souvent on voit un personnage voyager pour se transformer et pour apprendre ».
RRRrrrr!!!
Dans cette présentation qui s'indère dans le chapitre des armées imaginaires, voire humoristiques,
on ne pouvait éviter de parler du film d'Alain Chabat et des Robins des Bois qui réalise 1,7 million
d'entrées, ce qui n'est pas négligeable. Certes, les critiques sont, dans leur grande majorité,
très sévères avec le film : un « salmigondis où l'intrigue n'a que peu d'importance
» (Télérama), un « pastiche de La guerre du feu qui aurait gagné à être
raccourci de trente bonnes minutes » (Elle), au « rythme languissant de gags navrants de nullité
répétés jusqu'à l'écoeurement » (Le Nouvel Observateur). Même Aujourd'hui
en France, qui lui consacre sa Une et une double page, titre « Rrrr !: le film que Chabat aurait dû
refuser » et déplore « le grand vide [...] de l'humour ». Mais moi, j'ai bien ri par moments.
C'est l'essentiel !
Suivent deux films dans une veine plus réaliste dont cette liste ne s'inspire évidemment pas.
Si 10 000 de Roland Emmerich, (2008) peut aisément être oublié, on a noté en septembre
2010 « Ao le dernier Néandertal » de Jacques Malaterre. Malaterre est un spécialiste
des docufictions. Il offre ici un road movie paléolithique, qui réjouira petits et grands et les
fera réfléchir sur le sens qu'il faut donner à sa vie, ainsi qu'un grand film, qui marquera
l'histoire du cinéma de préhistoire.
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